Mercredi 3 novembre, fin d’après-midi, je reçois un appel de Bilal, apiculteur bruxellois me signalant avoir aperçu par hasard un nid de frelons au sommet d’un arbre bordant le parc Josaphat. Il faut dire que depuis quelques jours son rucher, situé à l’autre bout de la ville, est attaqué par les frelons et de ce fait, pour lui, scruter la cime des arbres est devenu un réflexe.
Dans le quart d’heure me voici sur place, matériel pour l’identification à l’appui, je suis prêt.
Premier constat, le nid est énorme, le plus gros que j’ai pu rencontrer, estimation 60 à 80 cm de diamètre !
L’automne a déjà bien œuvré, l’arbre est déshabillé de ses feuilles, la lumière rasante du soleil fait ressortir la couleur ocre du nid sur fond de ciel bleu. L’image est belle, une certaine poésie s’en dégage, on ne peut le nier…
Mais il s’agit bien d’un nid de frelons asiatiques et j’aperçois une belle activité tout autour. Pas d’hésitation, j’appelle le 112.
Je donne toutes les informations nécessaires :
D’abord je m’identifie, je signale la présence du nid de frelons asiatiques, je le localise exactement, dans ce cas-ci : face au n°28 avenue des Azalées à Schaerbeek, dix mètres à l’intérieur du parc Josaphat, au sommet d’un arbre à environ 25-30 mètres du sol. Je précise la double accessibilité pour leurs véhicules, soit depuis l’avenue ou directement en contrebas via la voirie du parc.
Bilal et moi, échangeons nos impressions tandis que nous rejoignent quelques badauds, intrigués par nos attitudes, nez en l’air, jumelles et appareil photos aux poings.
Alors que nous informons ces gens, déjà au loin on entend les sirènes, les pompiers arrivent en force. Mission accomplie pour nous, le relais est donné.
Les hommes du feu décident d’intervenir depuis l’intérieur du parc. Naturellement toute cette agitation attire les promeneurs et un balisage doit être mis en place pour sécuriser les lieux.
Nous répondons aux questions des curieux, profitant de l’occasion pour sensibiliser les gens à la présence envahissante du frelon asiatique dans la région.
Là-haut, dans leur nacelle, les pompiers injectent le neurotoxique dans le nid. Les frelons les assaillent de toutes parts, on comprend la nécessité de leurs combinaisons épaisses et on s’imagine aisément ce que doit être une attaque au hasard d’une rencontre sans équipement, l’horreur.
Le spectacle est terminé, le soleil se couche, tout le monde quitte la place, les uns satisfaits du travail accompli, d’autres heureux d’avoir appris de nouvelles choses, moi avec une multitude de questions en tête sur ce que nous réserve l’avenir…
Le lendemain je suis retourné sur les lieux. Un calme régnait dans le parc, par-ci par-là des frelons morts ou agonisants jonchaient le sol, quelques promeneurs s’arrêtaient pour chercher où se trouvait le nid, la rumeur s’était répandue. Alors qu’ils scrutaient l’arbre, je les avertissais poliment du danger pour les pattes de leurs chiens que représentaient les derniers frelons survivants cloués au sol. Du coup, j’ai prolongé ma mission d’information au sujet de Vespa velutina, créant de petits attroupements sympathiques, essaimant, qui sait, de futurs chercheurs de nids…
Il s’agit du second nid trouvé dans le coin (voir article dans le trimestriel précédent). Il y a de fortes probabilités que ce soient des nids enfants de celui qui se trouvait l’an passé dans ce même parc et pour lequel nous avions rencontré un refus de recherche.
Des nids restent à découvrir bien évidemment. Avec nos automnes doux les frelons asiatiques peuvent être actifs et produire des gynes jusqu’en décembre. Pour certains, la chute des feuilles les rendra visibles, d’autres seront signalés par la population de plus en plus à même de les reconnaitre grâce à nos actions.
Ce nid-ci était vraiment costaud, le genre à produire un maximum de fondatrices potentielles. Sa neutralisation, même relativement tardive, aura permis une diminution certaine de la prédation actuelle et future dans les ruchers environnants.
Le message est clair, la régulation de la pression du frelon sur nos ruches passe par la mobilisation de tous, il en va de l’avenir de nos petites protégées.
Raymond Peeters