Publié dans le Rucher Fleuri de septembre 2014

Dans un précédent article sur le thème de la gestion différenciée au jardin, nous avons vu qu’une certaine tolérance vis à vis de la végétation spontanée dans nos pelouses nous permettait d’accueillir une flore diversifiée et changeante au cours des saisons et de transformer ainsi un tapis vert uniforme et très pauvre au niveau biologique en un milieu beaucoup plus intéressant pour nos abeilles. De même, en changeant nos habitudes concernant les techniques de désherbage au jardin, nous nous pouvons œuvrer pour un environnement plus sain pour nous et la vie qui nous entoure.

 

La prévention avant tout

Dans les massifs de plantes vivaces et d’arbustes ainsi qu’au potager, un certain contrôle des adventices est nécessaire. Différentes méthodes de paillage nous permettent d’agir préventivement de manière efficace. En couvrant le sol, le paillage empêche la levée des adventices. Beaucoup de semences ont besoin de lumière pour germer et une épaisseur de quelques centimètres de litière organique empêche leur levée.

Le paillage a d’autres actions bénéfiques :

− il maintient une humidité favorable à la croissance des plantes

− il empêche le colmatage du sol et l’érosion lors de fortes pluies

− il limite les écarts de température du sol Paill

− il favorise le travail de la microfaune et de la microflore du sol

− il améliore la structure du sol − il enrichit le sol en humus et en nutriments

− il permet d’utiliser les matières organiques résultant de l’entretien du jardin ; cela veut dire aussi moins de manipulations, plus besoin d’aller à la déchèterie, …

− il permet d’éviter les dégâts aux collets des arbres causés par la tondeuse ou la débroussailleuse.

Paillages végétaux

Différents matériaux peuvent être utilisés : on pense bien sûr aux tailles de haie et d’arbustes, aux tiges séchées des graminées et des plantes vivaces, aux feuilles mortes, … Un broyeur permet de réduire le bois de taille en un produit facile à manipuler et à étendre dans les parterres. L’aspect homogène de ce broyat permet de l’utiliser dans des massifs décoratifs. Ce «bois raméal fragmenté» ou BRF a fait l’objet d’intéressantes études ces dernières années.

Dans des endroits moins visibles, on peut aussi utiliser le carton. En hiver, une couche de carton dans le potager permet de se retrouver au printemps avec un sol désherbé et grumeleux, idéal pour les premiers semis et repiquages. Toujours au potager, un paillis végétal peut être conservé tout au long de l’année. Il suffira d’écarter la couverture du sol pour repiquer les plants de légumes préparés en pépinière et de refermer ensuite le paillage pour récolter quelques semaines plus tard des légumes qui n’auront nécessité ni désherbage, ni arrosage, ni sarclage. Ces techniques de jardinage sans travail du sol, sur couvertures et compost végétaux sont décrites en détail dans les ouvrages cités en fin d’article.

En dehors des matériaux autoproduits au jardin, on trouve dans le commerce des produits de paillage d’origine végétale tels que les écorces de pins, les coques de cacao, les écorces de coco, les paillettes de chanvre. Mais, à moins d’habiter dans leurs régions de productions, on peut se poser la question du bienfondé du transport de ces matériaux exotiques jusque chez nous. Dans cette idée, l’achat d’un broyeur (éventuellement à plusieurs voisins) permettant une bonne utilisation des matériaux locaux est à envisager. Tous les matériaux d’origine végétale se décomposent petit à petit en améliorant la fertilité du sol. Dans les massifs décoratifs qui ne nécessitent pas un sol très fertile, on peut utiliser d’autres types de paillage qui ne se décomposent pas et ne nécessitent donc pas de les renouveler régulièrement.

Films et toiles

On connaît bien sûr les films plastiques utilisés pour la culture du fraisier ou les toiles de paillage tissées en polypropylène qui sont placées sur des talus à couvrir de plantes tapissantes. Des alternatives biodégradables existent, comme les toiles de paillage 100 % jute ou fibre de coco qui ont une durée de vie de ± trois ans. Le temps pour que les plantes choisies se soient implantées et empêchent la croissance des adventices.
Paillages minéraux

Moins connus sont les paillages minéraux : copeaux de schiste, gravier de rivière, gravier concassé, gravier de lave utilisés en couche de ± 7 cm permettent d’empêcher la croissance des adventices pour autant qu’ils aient été placés sur un sol soigneusement nettoyé des racines des plantes vivaces (liseron, chiendent, podagraire, prêle, …). Là aussi on recherchera des productions locales, vive la pierre du pays. Leur durée de vie est quasi illimitée et si leur effet fertilisant est minime, l’effet antiérosion et stabilisation des températures joueront leurs rôles.

Quelques moyens curatifs

Binette, serfouette, sarcloir, houe, ratissoire, griffe, il y a des outils adaptés à tous les stades de croissance des adventices. Plus tôt on intervient, plus facile sera le travail. Des techniques plus énergivores comme le désherbage thermique ou le moto binage peuvent avoir du sens dans certaines situations. À titre tout à fait anecdotique, l’eau bouillante des pâtes ou des pommes de terre sera utilement épandue sur les terrasses et chemins à désherber.
Désherbants

Je ne vous parlerai bien sûr pas des désherbants chimiques, mais on peut signaler l’existence de produits de désherbage «bio» actuellement commercialisés tels que le Top Gun ou le Ronge Tout. Il s’agit de produits composés d’acides gras organiques qui font éclater les cellules de la plante (comme dans le désherbage thermique) et entraînent son dessèchement progressif. Après l’avoir essayé, je dirais que l’efficacité est similaire au désherbage thermique (il faut repasser plusieurs fois pour arriver à bout des plantes à enracinement profond) pour un coût sensiblement plus élevé. Le produit est de plus fort (désagréablement) odorant.

Pour aller plus loin

− Guide du nouveau jardinage sans travail du sol, sur composts végétaux. Dominique Soltner. Très complet, didactique et bien illustré

− Le jardin naturel. Jean Marie Lespinasse

− Bois raméal fragmenté. Wikipedia ermet d’éviter les dégâts occasionnés au collet par le passage trop proche de la tondeuse ou de la débroussailleuse.

Texte et Potos : © Marc Eylenbosh - Septembre 2014